Interview : le pilotage du recrutement par la data.
Notre Directrice de projets RPO, Morgane Gucciardi a Ă©tĂ© interviewĂ© par la team Refty, outil de collecte des datas actionnables sur les candidat.es lors des recrutements, pour parler recrutement et data. Ce sujet d’actualitĂ© est autant passionnant que dynamique et ne manquera pas de vous surprendre. Vous pouvez retrouver l’intĂ©gralitĂ© de cette interview sur le blog de Refty.
Faisons connaissance : qui ĂŞtes-vous Morgane ?!
Je suis directrice de projet chez Solantis depuis 3 ans. J’interviens sur l’offre RPO (Recruitment Process Outsourcing) et j’accompagne mes clients et les recruteurs sur le bon déroulement des projets RPO.
Je suis exclusivement sur la partie tech, c’est-Ă dire tout ce qui est liĂ© aux startups, scale ups, Ă l’écosystème tech en gĂ©nĂ©ral.
Je les aide à couvrir leurs besoins tous les types de profils : du développeur au QA en passant par l’engineering manager, product manager ainsi que les postes sales / fonctions support . Mon champ d’action est donc très large.
Pourriez-vous nous dire ce qu’est est selon vous, la culture du data-driven ?
Dans un premier temps c’est de se poser les bonnes questions sur le type de data que l’on souhaite tracker, car de la data, on la retrouve partout.
C’est ensuite être en capacité de l’analyser correctement pour en tirer pleinement partie.
Chez Solantis, nous sommes “data driven”, ce qui veut dire que nous traçons la data, nous l’analysons et nous pilotons nos projets de recrutement en nous basant sur la donnĂ©e.
Ce pilotage par la donnĂ©e nous permet d’activer des leviers de performance et de prendre des dĂ©cisions stratĂ©giques ancrĂ©es dans le rĂ©el car Ă©tayĂ©es par des indicateurs clĂ©s de performance, qui sont par extension des Ă©lĂ©ments factuels.
On constate que chez beaucoup de nos clients, startup comme scale up, cette culture du “data driven” n’est pas encore établie à chaque étape du recrutement. De plus, il est nécessaire d’avoir mis en place une organisation et d’être structuré avant de s’intéresser à la data.
La data nous permet de nous inscrire dans une logique de performance et d’amélioration continue, ainsi que de tests & learn.
Comment la data permet-elle d’optimiser les recrutements ?
De manière concrète la data va permettre d’améliorer les processus. Par exemple, chez l’un de mes clients, nous étions dans un contexte dans lequel nous avions remarqué que le process de recrutement était perfectible à une certaine étape du process.
Nous avons, en réaction, apporté des solutions pour tracker la data à chaque étape du processus. Pour cela, nous avons mis en place un funnel très simple qui va de la première étape, à savoir l’identification des candidats jusqu’au recrutement.
Cela nous a permis d’identifier les points bloquants, en l’occurrence un taux de transformation faible liée à la complétion d’un test technique.
Par consĂ©quent, tout le travail de toutes les personnes (recruteur, les managers…) qui intervenaient sur la phase amont du process Ă©tait faiblement rĂ©compensĂ© car seulement 5% des candidats passaient l’étape du test technique.
La data nous a permis de voir que le taux de transformation à cette étape-là n’était pas satisfaisant. En identifiant l’origine de ce point de friction nous avons pu intervenir plus tôt dans le processus et ainsi permis de faire gagner du temps à tout le monde que ce soit pour le recruteur, le manager ou le candidat…
Quelles sont selon toi le top 3 des données relatives aux candidats qui vont être utiles pour un recruteur ?
Il y a tout d’abord la partie comportementale du candidat. Comment ce dernier va se nommer, se prĂ©senter, sa manière de s’exprimer etc.. C’est un point important de rĂ©ussir Ă tracker pour comprendre comment le candidat va orienter ses recherches en termes de poste et adapter sa stratĂ©gie de sourcing en fonction. En ce moment, je travaille sur un poste d’”Engineering manager”. Dans le cadre de ma stratĂ©gie sourcing je vais capitaliser sur l’intitulĂ© des rĂ´les, et sur la manière dont
ce poste, peut, d’une entreprise Ă une autre, avoir une autre terminologie comme : “Leader manager” ou “Technical manager”….Il y a Ă©normĂ©ment d’intitulĂ©s. Il faut donc analyser, et comprendre, comment cela fonctionne pour rĂ©ussir Ă Â cibler les bons candidats.
Il y a également un jeu de mots-clés qui va me permettre de comprendre le bon matching entre ce que va rechercher mon candidat et l’entreprise pour laquelle je travaille. Et pour cela il faut bien suivre son marché.
Chez Solantis nous travaillons avec un market mapping qui va nous permettre d’identifier, maintenir et mettre Ă jour toutes ces informations-lĂ : comment le candidat se nomme, dans quel type d’entreprises je vais retrouver le profil recherchĂ© etc…
Ensuite bien évidemment, il y a toutes les données que l’on peut tracker sur le profil du candidat via une scorecard par exemple. Mais globalement, ce sont toutes les informations que l’on peut avoir dans le premier entretien de pré-qualification, que ce soit sur les compétences, ou les formations. En clair toute l’expérience à mettre en lien avec ce que l’on va rechercher et ses aspirations.
Pour tracker tout cela on utilise un ATS (Applicant Tracking System) cela nous permet de nous inscrire dans une logique où l’on pourra réutiliser ces informations plus tard en capitalisant sur tous les candidats qui vont être interviewés à un moment donné et qui ne vont pas forcément rejoindre une entreprise.
C’est une partie de ce qu’on appelle le talent nurturing. Il est utile de pouvoir rĂ©utiliser cette donnĂ©e et d’alimenter le vivier de candidats sur le plus long terme pour imaginer reprendre contact avec ce candidat dans 6 mois, un an ou plus…
Et le troisième point, je dirais que c’est la personnalitĂ©Â des candidats, liĂ© Ă la partie soft skills. Cela implique d’identifier et de tracker les Ă©lĂ©ments clĂ©s de la personnalitĂ© du candidat pour les croiser avec avec les Ă©lĂ©ments de chaque culture d’entreprise afin de s’assurer de la bonne adĂ©quation.
En quoi ces données vont être utiles pour piloter le recrutement ?
a) Piloter la stratégie de sourcing
Nous passons en revue certains taux de transformation tout au long du processus de recrutement.
- Taux de conversion : candidats qualifiés / CVs envoyés.
- Taux de sélectivité : candidats en entretien / proposition envoyée.
- Taux de proposition : Nombre de propositions / Cvs envoyés.
- Taux d’attractivité : Nombre de recrutements / Nombre de propositions.
Cette analyse des données recrutement est la seule permettant de piloter réellement les stratégies de sourcing et de les adapter si besoin. Ces KPI’s permettent de définir la productivité de l’équipe projet et l’avancement des missions sur chaque périmètre.
b) Analyser les délais du processus de recrutement.
Une fois qu’on a définit ce dont on a besoin de tracker (ce qui va être pertinent en fonction du contexte) il faut définir le support (ATS ou excel) pour être en capacité d’analyser la data en calculant par exemple des taux et des ratios.
Quelques ratios que nous calculons chez Solantis :
- Time to hire : délai moyen entre le candidat sourcé et l’acceptation de la proposition d’embauche. C’est un indicateur qui a un impact sur beaucoup de choses : la qualité du processus, l’expérience candidat aussi et le taux de closing.
- Time to interview : délai entre le moment où le candidat est présenté et où il a un premier entretien physique.
- DĂ©lais des postes ouverts : depuis combien de temps le poste est en cours.
- Délai de proposition : délai entre le retour positif opérationnel et l’émission de la proposition au candidat.
L’analyse de ces indicateurs doit permettre de comparer les périodes entre elles mais aussi de pouvoir se comparer à un écosystème.Chez Solantis, on voit des contextes de clients très différents.Nous avons une idée assez claire de comment fonctionne le marché pour un client donné, comment va se situer son “time to hire” par rapport au reste de son marché.Si jamais nous identifions un time to hire trop long, nous mettons immédiatement en place des actions pour y remédier.
c ) Indice de satisfaction des nouveaux collaborateurs
Mesurer la satisfaction du candidat lorsqu’il est recruté est à la fois une démarche d’amélioration continue pour le recrutement et les interviewers, ainsi qu’une façon de se démarquer sur un marché de postes pénuriques.
Pour ce faire, nous basons nos actions sur la recherche d’une expérience candidat de qualité à savoir :
- Une communication transparente,
- La personnalisation des messages,
- Des retours négatifs détaillées aux candidats
- Une définition claire des étapes du processus
- Demander du feedback en continu
Pour récolter ces informations, nous recommandons la réalisation d’enquêtes de satisfaction pour tous les candidats ayant intégré un process chez nos clients.
Nous mettons habituellement en place un questionnaire de satisfaction via Survey Monkey (logiciel de sondage en ligne) celui-ci peut ainsi être décliné à toutes les étapes du processus de recrutement.
Avez-vous des chiffres précis sur l’utilisation de la data dans le recrutement ?
Nous avons mené une étude, nommée RecruitNow, auprès de 644 personnes (recruteurs, managers opérationnels, candidats et RH) autour de 3 grands thèmes: l’humain avec l’importance de l’expérience candidat, la data et la technologie, la marque employeur.
On y dĂ©couvre que data est largement utilisĂ©e Ă 84% par les recruteurs dans le cadre de leur activitĂ©. Elle l’est principalement Ă 63%, pour le pilotage de leur activitĂ© et l’optimisation du processus. Cependant, elle est encore très peu utilisĂ©e Ă des fins d’aide Ă la prise de dĂ©cision, tant pour les candidats que pour les managers. Cette voie d’usage de la donnĂ©e reste encore beaucoup Ă explorer pour en tirer tout le potentiel.
Quelle utilisation de la data par les recruteurs:
- 45% l’utilise pour le vivier de candidats
- 61% pour le suivi et le pilotage du processus de recrutement
- 26% Pour l’optimisation du processus recrutement
- 26% Pour améliorer la cartographie du marché
- 34% Pour orienter les opérationnels
- 6% Pour orienter les candidats
Est ce que tu aurais un conseil Ă donner Ă un Ă©quipe de recrutement qui souhaitent inclure la data dans leur dans leur process ?
La question Ă se poser absolument c’est : “qu’est ce que j’ai envie de tracker et pourquoi je le track ?”. Le fait d’inclure la data dans son process est très important mais il faut bien identifier si cela va rĂ©pondre Ă mon besoin, je suis dans le bon timing pour le faire. Parce qu’avoir de la data c’est bien mais avoir le temps, l’envie de l’analyser, de l’exploiter…c’est mieux 🙂 Si par exemple, on se rend compte que tel taux n’est pas forcĂ©ment très bon, il faut ĂŞtre en capacitĂ© de faire quelque chose pour l’amĂ©liorer. En bref, ĂŞtre dans une dĂ©marche d’amĂ©lioration continue. Dans un premier temps commencez Ă partir des donnĂ©es ce que vous avez Ă disposition ou facilement rĂ©cupĂ©rable.
Vous ferez des itérations au fur et à mesure avec les données en y ajoutant quelques kpi complémentaires. Ne vous fixez pas d’objectifs trop ambitieux au démarrage d’autant que cela prendra plusieurs semaines avant d’avoir des ! Initiez la démarche avec les données que vous avez ou que vous pouvez facilement récupérer : -> le cout par recrutement, la durée d’un process ou le nombre de postes par recruteur par exemple.
Merci Ă Morgane et BarthĂ©lĂ©my de chez Refty pour cette interview ! Nous espĂ©rons que ces informations vous auront permis d’en apprendre plus sur la data et pourront vous permettre de l’utiliser dans vos process. Retrouvez plus d’actualitĂ©s sur ce sujet sur blog.refty.co !